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RECOURS AU FREELANCE

par | 27. Sep 2024

Le recours aux freelances est de plus en plus fréquent : plus d’une société sur deux a admis avoir recours de manière ponctuelle à cette forme particulière de travailleur indépendant.
Les travailleurs indépendants sont donc de plus en plus nombreux et de plus en plus demandés par de nombreuses entreprises qui peinent à recruter des salariés et doivent s’adapter face à cette forme particulière de collaboration.

Quels sont les avantages au recours d’un travailleur indépendant ?

Facilité de recrutement via les plateformes de mise en relation en cas de pénurie de talents (il faut en moyenne 6 jours pour recruter un freelance et plusieurs mois pour recruter un salarié en CDI).

Besoin de flexibilité : le recrutement comme la rupture du contrat du freelance sont particulièrement simplifiés par rapport aux conditions d’embauche et de départ d’un salarié. Cette flexibilité amène de plus en plus d’entreprises françaises à engager des travailleurs en freelance.

Avantage financier : recourir au freelance coûte moins cher à une société qu’un salarié (par exemple, absence de paiement de cotisations sociales).

Expertise pointue : agilité et adaptabilité. Contrairement aux salariés, les freelances peuvent facilement changer de mission, de secteur ou de client en fonction de leur évolution professionnelle et de leurs envies. Les freelances ont également une capacité à innover et à apporter des idées nouvelles. En effet, en travaillant sur plusieurs missions pour différents clients, les indépendants ont une vue d’ensemble sur les tendances et les pratiques en vigueur dans leur domaine.

 

Pour sécuriser la relation de travail, il est nécessaire de rédiger un contrat de prestation de services.

L’engagement d’un freelance n’a pas vocation à remplacer un poste salarié, de fait, la rédaction du contrat diffère de celui d’un contrat de travail.

Il n’existe pas de formalisme particulier pour la rédaction du contrat du freelance mais les entreprises doivent veiller à respecter certains critères :

    • Vérifier que l’indépendant est bien immatriculé auprès du CFE et dispose d’une assurance responsabilité civile professionnell

    • Lorsque le contrat de freelance implique un montant minimum de 5 000 euros, la société cliente doit s’assurer lors de la conclusion du contrat et tous les 5 mois que le freelance respecte ses obligations de déclaration et de paiement des cotisations sociales. Le travailleur indépendant doit fournir une attestation de vigilance URSSAF et l’employeur doit s’assurer de sa validité et de son authenticité,

    • A minima, le contrat doit inclure les coordonnées des deux parties, la nature de la mission, la rémunération fixée et les modalités de paiement de cette rémunération.

Cela étant, il est également conseillé aux entreprises clients de prévoir dans le contrat :

    • Une réunion hebdomadaire pour faire un point sur l’avancement du projet,

    • Un calendrier, une date de rendu de la prestation,

    • Une obligation de confidentialité, en particulier dans les secteurs très concurrentiels,

    • Une clause de cession de droit d’auteur éventuelle,

    • Des pénalités éventuelles en cas de retard,

    • Les modalités de sous-traitance éventuelle.

Et il faut également prévoir les modalités de résiliation dudit contrat :

    • Si le contrat est à durée déterminée, le contrat prendra fin à la date fixée par le contrat mais il est possible de prévoir une clause de résiliation anticipée,

Si le contrat est à durée indéterminée, le contrat peut être résiliable à tout moment mais il est nécessaire de prévoir un délai de préavis raisonnable pour laisser aux parties le temps de s’organiser.

 

Quels sont les inconvénients au recours d’un indépendant ?

Même en ayant régularisé un contrat de freelance entre les parties, cela n’exclut pas les risques puisqu’aux yeux de la loi ce sont les conditions d’exécution du contrat qui priment.

Ce que va regarder un juge en cas de contentieux c’est l’existence ou non d’un lien de subordination, le freelance est-il indépendant et autonome ?

Ainsi, la jurisprudence rappelle que toute condition de travail mise en place exclusivement par l’entreprise cliente telle que l’organisation d’un planning ou des dates de réunions décidées unilatéralement sont des pratiques menaçant l’autonomie du freelance.

Aussi, dans la mesure où le travailleur indépendant recruté reste autonome dans l’organisation de son travail, l’entreprise cliente respecte les conditions légales liées au recours au freelance.

Au contraire, si l’entreprise impose des conditions de travail similaires à celles d’un salarié, le freelance peut être qualifié de « faux » indépendant, soulevant le risque pour l’entreprise de commettre le délit de travail dissimulé et les sanctions qui y sont afférentes (article L8224-1 et suivants du Code du travail).

Les entreprises peuvent donc facilement se prémunir contre le délit de travail dissimulé en respectant l’indépendance et l’autonomie de l’indépendant.

Par ailleurs, la société ne doit pas mettre le freelance dans un cas de dépendance économique, ce qui signifie que la société ne doit pas être l’unique client du freelance. Celui-ci doit impérativement avoir d’autres clients, ce qui signifie que son chiffre d’affaires pour la société cliente ne doit pas dépasser 80%.

L’entreprise cliente doit également faire attention à la façon dont elle interagit avec le freelance, en effet, elle doit veiller par exemple à la façon doit elle rédige ses mails et en particulier ne pas lui donner de directives qui pourraient s’apparenter à l’existence d’un lien de subordination.

 

Quelles sanctions peuvent s’appliquer à la société cliente si elle ne respecte pas les critères propres au travailleur indépendant ?

Ne pas respecter les conditions de travail du travailleur indépendant peut couter cher à la société car en cas de contentieux le freelance pourrait formuler les demandes suivantes :

    • La requalification du contrat de prestation de service en contrat de travail à durée déterminée,

    • Une indemnité au titre du travail dissimulé qui est une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire,

    • Eventuellement des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

    • Rappel de cotisations sociales et URSSAF sur les salaires qu’auraient dû payer la société,

    • Rappel des éléments de salaire qu’auraient tous les autres salariés de la société (prime d’intéressement, prime ancienneté, heures supplémentaires, congés payés afférents),

    • Eventuellement une sanction pénale peut être prononcée contre la société jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

En outre, si le contrat de freelance a pris fin de manière abusive aux yeux du travailleur indépendant et que le Conseil de Prud’hommes considère bien que le contrat de freelance devrait être requalifié en CDI, toutes les indemnités afférentes à la rupture d’un contrat de travail seront dues :

    • Indemnité de licenciement,

    • Indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents,

    • Indemnité pour licenciement abusif encadrée par l’article L1235-3 du Code du travail.

La solution du portage salarial.

Pour faire appel à un freelance dans des conditions sereines, il est possible de recourir au portage salarial.

Les avantages du portage salarial font que ce dispositif est intéressant pour les entreprises clientes qui souhaitent avoir recours à des prestataires externes.

En effet, les entreprises peuvent ainsi accéder à des consultants portés par le biais de l’entreprise de portage salarial, le respect de la réglementation sociale incombant à l’entreprise de portage salarial.

La relation commerciale entre travailleurs indépendants portés et entreprises clientes est supervisée par l’entreprise de portage salarial, neutralisant ainsi les risques de subordination juridique entre les parties.

Le portage salarial est différent du travail temporaire car le travailleur indépendant porté négocie les conditions d’exécution de sa prestation directement avec l’entreprise cliente et le choix de l’entreprise de portage salarial lui appartient.

L’entreprise cliente signe un contrat commercial de prestation de service avec la société de portage salarial. Le contrat reprend les éléments essentiels de la négociation de la prestation entre le salarié porté et l’entreprise cliente.

Toutefois, même dans ce cas, la société cliente reste responsable des conditions d’exécution du travail du salarié (santé, sécurité, durée du travail par exemple).

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Cet article est également à lire sur le site internet Village de la justice : https://lnkd.in/dsz8bvZm